AUTOPSIE

Série de 25 dessins
Graphite et pierre noire sur papier, 27 x 26 cm, 2020-2021

 

 


La série "Autopsie" a été réalisée d'après photographies des trousses d'élèves. Il m'importe de partir du réel, de le fouiller. Mon approche n'est pas sociologique pour autant: le projet Un collège de France, et plus particulièrement "Autopsie", porte un regard poétique sur la figure de l’élève. Une figure qui résiste, une figure qui échappe à l'enseignant tentant de répondre à question « Qui es-tu ?».

La série est constituée de vingt cinq trousses, soit le nombre,  peu ou prou- d'élèves dans une classe. Les trousses ont été réalisées au même format et avec la même technique. Je voulais ainsi singer l'analyse méthodique et clinique du geste chirurgical. Avoir recour au dessin d'observation quand il s'agit d'observer.

Ainsi isolée sur fond blanc et positionnée de façon verticale, la trousse donne accès à un ailleurs au-delà du réel. On s'étonne presque de n'y trouver que des ciseaux, des gommes, des stylos, etc. N'est-ce que cela? Chaque trousse est un portrait. Sa texture, son contenu, l'agencement des outils de l'élève livrent un portrait ouvert que le spectateur complète par ses propres souvenirs d'écolier.

 

 

NUQUES
Installation
Douze boîtes en bois (25 x 20 x 11 cm) contenant chacune un dessin au graphite, pierre noire et crayon blanc sur papier (18 x 11 cm), 2019-2021

 

 

Que montre une photo d’identité ? Que révèle-t-elle d’un individu ? La série « Les Nuques » est le revers d’un trombinoscope. Loin de pouvoir identifier quiconque, les volets s’ouvrent sur des nuques : la nuque de l’élève qui échappe, s’échappe, s’abandonne au travail.

Le dispositif a pour but de mettre en abime le regard de l’enseignant « face à » l’élève. Il s’agit donc moins de représenter tel élève que faire éprouver l’angle bien particulier de leur rencontre : veiller et surveiller.

Chaque portrait a été réalisé sur une page de livre appartenant au CDI du collège Victor Hugo de Harnes (Pas-de-Calais), des livres qui (à en juger des dates d’emprunt) avaient appartenu à mes élèves, leurs ainés et leurs parents avant eux, des livres qui allaient au pilon. L’ouverture à deux battants évoque à la fois un livre, un tabernacle.  Les volets, ouverts à des degrés divers, racontent la part de mystère irréductible propre à chaque individu.

Les boîtes ont vocation à être manipulées par les spectateurs devenant acteur à leur tour.


 

 

   PEUT-ÊTRE

   Stylo bille sur contrecollé coloré, 24 x 18 cm, 2021



 

Quelque chose se trame.

L’action a-t-elle déjà eu lieu ? Va-t-elle se passer ? Ou bien est-elle prise sur le vif ? Une narration qui nous laisse sur le seuil. Dans cette ambiance polar, le spectateur fait figure d’enquêteur. Un enquêteur qui doit remettre les éléments dans l’ordre. Au gré de ses déplacements sur la pellicule, de la libre association des séquences entre elles, des hypothèses se dessinent, se bousculent, se superposent, se contredisent.
 

Pour toute réponse : « peut-être ». Ici, les adolescents jouent de leur insolence. Car la formule est à la fois le message codé qui relie les personnages de l’action et la réponse narquoise qu’ils adressent au spectateur en quête de sens.
Il n’est pas question ici de restituer un évènement ni de représenter un établissement scolaire. La série Peut-être est conçue comme un jeu de construction où les récits s’emboîtent. Ainsi, les aplats géométriques noirs ont pour but de signifier le collège comme instrument de cadrage plutôt que de le représenter. 
 

Pris et rejeté. D’un côté, l’attention du spectateur est captée par l’indice écrit, et de l’autre il est laissé à la marge de regards qui ne le regardent pas. Soit que l’adolescent regarde quelque chose qui se situe en dehors du champ, soit qu’il contemple quelque chose en lui. Le tout laisse l’impression irritante que la solution est juste là et qu’elle échappe sans cesse. Qui est cette personne ? Quelle est cette chose qui les observent ? Qu’observent-ils en retour ? Ici, quelqu’un les regarde au même titre que le spectateur : notre équivalent dans la fiction.
 

« Peut-être » est la formule qui caractérise le mieux l’adolescence : l’enfance qui se barre, l’adulte qui ne veut pas se pointer. Le temps hésite à avancer ou à reculer. Le drame à suspens me semblait adapté pour évoquer cette période suspendue.
Un incendie sans feu, un incident sans fin.


 

 

 

   UN COLLÈGE DE FRANCE

   Série de dessins entâmée en août 2018
   Techniques mixtes

 

 

 

C'est au cours de mes sept premières années d'enseignement dans le Pas-de-Calais que murit le projet « Un Collège de France » dont la réalisation commence seulement après avoir quitté ce collège pour un autre. En ce temps de bilan, je cherche alors à savoir ce que j'ai retenu de mes élèves, ce que j'ai appris d'eux.
En choisissant les mêmes « armes » que mes élèves (le bic, le crayon, parfois le fusain -faisant ainsi référence au patrimoine minier de la région) je souhaite me mettre au même endroit qu’eux et tenter de combler la distance, inhérente et indispensable au travail d'enseignant, entre professeur et élèves. Mon sujet m'échappant sans cesse, je crée des espaces poétiques ouverts, dévoilant des narrations à sens multiples, creusant toujours ce qui se cachent derrière ces élèves tant de fois côtoyés et pour autant toujours mystérieux.